Cession de fonds de commerce et salariés : droits, obligations et démarches

📑 SOMMAIRE :

Introduction

La cession de fonds de commerce est une opération fréquente dans la vie d’une entreprise, mais elle soulève de nombreuses questions pour le vendeur, l’acquéreur, et surtout pour les salariés du commerce concerné. La transmission d’une activité implique en effet le transfert automatique des contrats de travail au nouvel employeur, selon des règles précises fixées par le Code du travail. Quels sont les droits des salariés ? Quelles démarches sont imposées à chaque partie ? Comment anticiper les risques ? Ce guide complet fait le point sur l’essentiel à savoir.


Le principe du transfert automatique des contrats de travail

Lorsqu’il y a cession du fonds de commerce, l’article L. 1224-1 du Code du travail prévoit le transfert de plein droit des contrats de travail en cours au moment de la vente. Concrètement, cela signifie que tous les salariés rattachés au fonds voient leur contrat transféré à l’acquéreur du fonds, sans interruption de la relation de travail, ni modification de leurs droits. Ce principe d’ordre public s’applique quelle que soit la taille de l’entreprise ou le secteur d’activité. Le but est d’assurer la protection des salariés et d’éviter toute perte d’emploi injustifiée.

À retenir :

  • Le transfert de propriété du fonds entraîne automatiquement le transfert des contrats de travail rattachés à ce fonds.
  • Le nouvel employeur (l’acquéreur) devient responsable des droits et obligations issus des contrats, comme s’il avait lui-même procédé à leur conclusion.
  • Le vendeur ne peut pas “garder” certains salariés ou choisir lesquels seront transférés.
  • Même en cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, le principe s’applique, sauf exceptions prévues par la loi.

Les obligations d’information préalable

La cession du fonds de commerce implique des obligations d’information préalable à la charge du vendeur :

a) Information des salariés

Dans les entreprises de moins de 250 salariés, la loi impose au cédant d’informer tous les salariés de son intention de vendre, afin de leur permettre de présenter une offre de reprise du fonds. Cette information doit être donnée au moins deux mois avant la conclusion du contrat de vente. L’objectif est d’ouvrir la possibilité d’une reprise par les salariés eux-mêmes, si ceux-ci souhaitent devenir entrepreneurs.

Attention : Le non-respect de l’information préalable pouvait entraîner la nullité de l’acte de cession du fonds de commerce (sauf en cas de vente au sein du groupe familial ou à un proche).

Aujourd’hui, le non-respect de l’obligation d’information préalable n’entraîne pas la nullité de la cession du fonds de commerce, mais expose le vendeur à une sanction pécuniaire, pouvant aller jusqu’à 2 % du prix de la vente, sur action d’un salarié dans un délai de deux ans

b) Information des représentants du personnel

Si l’entreprise est dotée d’un comité social et économique (CSE), ce dernier doit également être informé et consulté, selon les modalités prévues par le Code du travail.

c) Modalités d’information

L’information doit être délivrée par tout moyen permettant de donner date certaine à la notification (lettre remise en main propre contre décharge, courrier recommandé, etc.). Un registre spécial ou une attestation de remise peut s’avérer utile en cas de contentieux.

d) Délai à respecter

Le délai minimum de deux mois doit être respecté entre la notification de l’information et la signature de l’acte de cession. Ce délai est impératif : il permet aux salariés de préparer une éventuelle offre de reprise et à l’employeur de sécuriser son opération.


Les conséquences pour les salariés

Le transfert de propriété du fonds de commerce entraîne plusieurs conséquences majeures pour les salariés :

a) Maintien du contrat de travail et de l’ancienneté

Le contrat de travail de chaque salarié est repris dans les mêmes conditions, sans modification du poste, de la rémunération, de l’ancienneté ou des avantages acquis. Le nouvel employeur ne peut pas imposer une modification unilatérale, sauf accord du salarié.

b) Traitement des congés payés et avantages

Le traitement des congés payés est un point sensible. En principe, les congés acquis mais non pris à la date de la cession sont transférés à l’acquéreur, qui devra permettre au salarié de les poser ultérieurement.
Si une convention collective ou un accord prévoit un régime particulier, il conviendra de s’y référer.

c) Avantages collectifs et usages

Les usages d’entreprise, les accords collectifs, le règlement intérieur, ou tout autre élément du cadre social applicable dans l’entreprise continuent de s’appliquer, au moins jusqu’à ce que le nouvel employeur les modifie dans les règles (négociation, information des salariés…).

d) Licenciement possible ?

En principe, le transfert de plein droit empêche le licenciement des salariés du seul fait de la cession. Néanmoins, un licenciement pour cause réelle et sérieuse (par exemple : motif économique ou faute grave) reste possible, mais il devra être justifié par des éléments objectifs, distincts de la seule opération de cession.
Un licenciement réalisé dans la foulée de la cession est susceptible d’être contesté devant le conseil de prud’hommes.


Obligations du vendeur et de l’acquéreur

a) Obligations du vendeur (cédant)

  • Informer les salariés et, le cas échéant, les représentants du personnel.
  • Payer l’ensemble des salaires, charges sociales et accessoires dus jusqu’à la date de transfert.
  • Transmettre à l’acquéreur tous les dossiers du personnel, contrats et documents liés aux contrats de travail transférés.
  • Garantir à l’acquéreur que la liste du personnel fourni est complète et sincère.

b) Obligations de l’acquéreur (cessionnaire)

  • Prendre en charge tous les contrats de travail transférés, sans rupture ni modification.
  • Assurer la continuité du paiement des salaires, primes, avantages en nature, etc.
  • Respecter l’ancienneté et les droits acquis.
  • Assumer les obligations liées à la protection des salariés (santé, sécurité, formation…).
  • Mettre à jour le règlement intérieur si besoin, et intégrer les nouveaux membres à l’équipe existante.

c) Répartition des charges et du prix

Le prix de vente du fonds de commerce doit intégrer les éventuels passifs sociaux : congés payés non pris, primes d’ancienneté, etc.
Un inventaire précis des sommes dues à chaque salarié doit être établi au moment de la signature de l’acte de cession.
Il est d’usage que l’acquéreur rembourse au vendeur les charges sociales et salaires correspondant à la période postérieure à la cession.


Étapes pratiques de la cession avec salariés

Pour sécuriser la cession du fonds de commerce et le transfert des salariés, il convient de respecter certaines étapes :

  1. Préparer l’opération : vérifier le nombre, la situation et l’ancienneté des salariés attachés au fonds.
  2. Informer les salariés : respecter le délai légal et les modalités de notification.
  3. Inclure dans l’acte de cession : insérer une clause spécifique relative à la reprise des salariés et à la gestion des droits sociaux.
  4. Informer l’administration : mettre à jour les registres légaux et effectuer les formalités d’enregistrement.
  5. Coordonner avec le bailleur : s’assurer que le bail commercial prévoit bien le transfert du droit au bail au nouvel exploitant.
  6. Effectuer le transfert de propriété : à la date fixée dans l’acte authentique, le nouvel employeur prend la direction du personnel.

Cas particuliers

a) Refus d’un salarié d’être transféré

Un salarié peut-il refuser d’être transféré ? En principe, non : le transfert s’impose à tous, sauf si le salarié démontre une modification substantielle de son contrat de travail ou de ses conditions de travail. En pratique, si un salarié refuse, il est réputé démissionnaire ou son contrat peut être rompu pour cause réelle et sérieuse, selon le cas.

b) Licenciement économique avant ou après cession

Si l’employeur anticipe une reprise difficile ou une suppression de poste, un licenciement économique peut être envisagé avant la cession, mais il doit alors respecter les procédures du Code du travail (motif, indemnités, consultation des représentants…).
Après la cession, seul le nouvel employeur peut, le cas échéant, procéder à un licenciement pour un motif objectif et indépendant de la cession elle-même.

c) Redressement ou liquidation judiciaire

En situation de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, la règle du transfert de plein droit s’applique, mais certaines dérogations existent.
L’administrateur judiciaire ou le tribunal peut autoriser le transfert partiel du personnel, voire prévoir des licenciements collectifs pour motif économique, sous contrôle du juge.

d) Sort des représentants du personnel

Les mandats des représentants du personnel continuent de s’exercer après la cession, sous réserve du maintien des effectifs dans l’entreprise reprise.


FAQ – Questions fréquentes sur la cession de fonds de commerce et salariés

Peut-on licencier un salarié lors de la cession du fonds de commerce ?
En principe, non. La seule cession du fonds n’est pas une cause réelle et sérieuse de licenciement. Un licenciement n’est possible qu’en cas de motif objectif : faute grave, inaptitude, ou motif économique indépendant de la vente.

Le nouvel employeur peut-il modifier les contrats de travail ?
Non : le contrat de travail est repris dans les mêmes conditions. Toute modification doit faire l’objet d’un accord exprès du salarié concerné.

Qui paie les congés payés non pris lors de la cession ?
Le plus souvent, l’acquéreur prend en charge les congés payés acquis non pris, mais une compensation financière peut être prévue entre les parties dans l’acte de cession.

Quelles sont les sanctions en cas de non-respect de l’obligation d’information des salariés ?
L’information préalable est une condition suspensive essentielle. Sa violation peut entraîner la nullité de la vente et des sanctions financières pour le vendeur.

Quels documents doivent être transmis lors du transfert des salariés ?
Tous les éléments du dossier du personnel : contrats, avenants, fiches de paie, documents relatifs aux droits sociaux, etc.

Le transfert des contrats s’applique-t-il à tous les salariés ?
Oui, à tous les salariés affectés à l’activité transférée, quelle que soit la nature de leur contrat (CDI, CDD, temps plein ou temps partiel).


Conclusion

La cession de fonds de commerce est une opération complexe, notamment en raison des enjeux liés au transfert des salariés. Pour sécuriser l’opération, il est indispensable d’anticiper les obligations d’information préalable, de soigner la rédaction de l’acte de cession et de respecter les droits de l’ensemble des parties.
Le respect du Code du travail et l’accompagnement par un professionnel du droit (avocat, expert-comptable, notaire) sont des garanties essentielles pour éviter tout contentieux ultérieur.
N’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé en droit des affaires pour accompagner chaque étape et garantir la conformité de votre cession du fonds de commerce, dans l’intérêt du vendeur, de l’acquéreur et surtout des salariés concernés.


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