La cession de fonds de commerce est une opération juridique et économique majeure qui nécessite une préparation minutieuse. Elle ne se résume pas à la signature d’un contrat : elle implique de nombreuses formalités et un ensemble de contrôles préalables indispensables pour sécuriser l’opération et éviter tout litige ultérieur.
Que vous soyez vendeur ou acquéreur, certaines étapes doivent être respectées pour protéger vos intérêts et garantir un paiement serein du prix.
1. Comprendre le nantissement de fonds de commerce
Le nantissement conventionnel du fonds de commerce est un contrat par lequel le propriétaire du fonds de commerce (souvent le débiteur) donne en garantie à un créancier le fonds dans son ensemble, c’est-à-dire l’enseigne, le nom commercial, la clientèle, le droit au bail et parfois le matériel ou l’outillage (article L142-2 du code de commerce).
Il s’agit d’une sûreté réelle inscrite au registre compétent, qui permet au créancier, en cas de non-paiement, de faire vendre le fonds et de se faire payer sur le prix de vente par préférence aux autres créanciers.
Ce mécanisme est régi par les articles L. 142-1 et suivants du Code de commerce, complétés par diverses dispositions du Code de procédure civile et du Code civil. Dans certains cas, une ordonnance du juge peut être nécessaire, notamment pour autoriser certaines mesures conservatoires.
2. Les vérifications préalables avant la cession
Avant de signer l’acte de cession, plusieurs vérifications doivent être effectuées :
- Vérification juridique : contrôle des titres de propriété ou du bail commercial. Le cédant doit fournir un extrait Kbis récent, la copie conforme du bail, ainsi que la liste des éléments corporels et incorporels composant le fonds de commerce.
- Recherche sur le créancier : s’assurer qu’aucun nantissement ou inscription antérieure n’affecte le fonds. Cela se fait via la consultation des registres officiels et la demande d’un état d’endettement (souvent appelé état des privilèges et nantissements avec mention des inscriptions ou un état délivré par le greffe). Ce document doit, au même titre que le Kbis, être annexé à tout acte de cession.
- Analyse financière : le repreneur et son conseil examinent les bilans, les résultats, et le plan d’affaires. Cela permet d’anticiper la capacité de remboursement et de mesurer le risque pour le créancier.
- Vérification fiscale et sociale : s’assurer que le débiteur est à jour de ses obligations fiscales et sociales afin d’éviter que des dettes non révélées ne viennent grever le fonds.
- Absence de procédures : vérifier qu’aucune procédure collective, ordonnance de saisie ou mesure de signification n’est en cours.
3. Les effets juridiques du nantissement
La prise de nantissement confère au créancier un droit de préférence et un droit de suite :
- Le droit de préférence signifie que, lors de la vente du fonds de commerce, le créancier nanti est payé avant les autres créanciers sur le prix de cession, dans la limite de sa créance.
- Le droit de suite permet au créancier de faire saisir et vendre le fonds même si celui-ci a été cédé à un tiers, afin de se rembourser sur le produit de la vente.
Le nantissement doit être publié au registre du commerce et des sociétés (RCS), généralement accompagné d’un extrait et d’une copie conforme du contrat. À défaut de publication, il ne sera pas opposable aux autres créanciers.
4. Nantissement judiciaire vs nantissement conventionnel
On distingue :
- Le nantissement conventionnel : librement consenti par le débiteur au profit du créancier. Il résulte d’un accord écrit, souvent intégré à l’acte de cession ou à un contrat de prêt.
- Le nantissement judiciaire : ordonné par le juge au profit d’un créancier qui justifie de sa créance et de circonstances susceptibles d’en menacer le paiement. Dans ce cas, une ordonnance est rendue et doit être suivie d’une signification au débiteur.
Le choix entre ces deux formes dépend de la nature de l’opération et du degré de confiance entre les parties. L’accompagnement par un avocat ou un conseil juridique est fortement recommandé pour sécuriser la démarche.
5. La radiation du nantissement
Une fois la dette intégralement remboursée, le créancier doit donner mainlevée du nantissement. Cette formalité se matérialise souvent par une ordonnance du président du tribunal de commerce ou par un acte de mainlevée établi par le créancier.
Pour être pleinement opposable, la mainlevée doit être publiée au registre du commerce et des sociétés. Le débiteur ou le nouveau propriétaire du fonds peut également solliciter la radiation judiciaire si le créancier tarde à exécuter cette formalité malgré le paiement intégral.
6. Risques et précautions
Le nantissement de fonds de commerce offre une sécurité au créancier, mais il comporte aussi des risques pour le débiteur. En cas de non-respect des conditions convenues, la vente forcée du fonds peut conduire à la perte totale de l’outil de travail.
Pour limiter ces risques, il est essentiel :
- D’évaluer précisément la valeur du fonds de commerce avant toute opération.
- De négocier avec le créancier des conditions de remboursement réalistes.
- De vérifier que le kbis et l’extrait conforme du registre ne comportent pas d’autres inscriptions.
- De consulter un professionnel juridique ou un avocat cession de fonds de commerce pour sécuriser chaque étape Cela est souvent crucial pour la jouissance du fonds et par conséquent, la pérennité de votre activité.
Une attention particulière doit aussi être portée à la signification des actes, afin d’éviter des contestations ou des retards dans la procédure. Les pièges à éviter lors d’une cession de fonds de commerce sont nombreux.
7. Nantissement et cession du fonds de commerce
L’avocat de l’acquéreur, ou des deux parties, devra impérativement rechercher l’information relative au nantissement du fonds à céder.
Le chef d’entreprise qui cède son fonds a, généralement, bénéficié d’un prêt de la part d’une banque pour financer l’acquisition du fonds qu’il entend, à présent, revendre.
Il est rare que la banque prêteuse, ne mette pas en place une garantie du type nantissement ou subrogation dans le privilège du vendeur de fonds de commerce.
C’est la raison pour laquelle, dès la prise de possession du fonds, la banque va déposer un bordereau demandant le nantissement du fonds.
Pour permettre à l’entrepreneur qui rachète le fonds de ne pas s’en voir déposséder, l’avocat obtiendra la mainlevée du nantissement de manière à éviter toute dépossession du fonds acheté.
Régulariser une cession du fonds de commerce sans s’assurer qu’il n’est pas nanti ou que la mainlevée du nantissement peut être obtenu est particulièrement risqué.
La mainlevée ou la prise de nantissement fait très souvent partie des étapes clés d’une cession de fonds de commerce.
8. Nantissement du fonds de commerce et cession du droit au bail
Il est fréquent lorsque l’on signe une promesse de cession d’un droit au bail, de prévoir une condition suspensive tenant en l’absence de mesure de sûreté.
En effet, le droit au bail est un des éléments du fonds de commerce. Si le fonds est nanti, le cessionnaire d’un droit au bail risque de le perdre si le créancier fait valoir ses droits. En fonction du montant garanti par la sûreté, le risque est plus ou moins important et peut être couvert par un séquestre ou un paiement anticipé de la dette.
Conclusion
La cession de fonds de commerce et la constitution d’un nantissement sont deux opérations indissociables dans de nombreuses transactions. Si elles permettent au créancier de se prémunir contre le risque d’impayé, elles nécessitent une préparation méticuleuse et un suivi rigoureux des formalités.
Que vous soyez débiteur ou créancier, l’accompagnement par un professionnel du droit est un gage de sécurité et d’efficacité. Un avocat spécialisé en cession de fonds de commerce pourra vous conseiller sur la meilleure stratégie à adopter, assurer la conformité des documents (y compris l’extrait et la copie conforme du kbis) et défendre vos intérêts en cas de litige.
FAQ – Le nantissement de fonds de commerce
1. Qu’est-ce qu’un nantissement de fonds de commerce ?
Le nantissement de fonds de commerce est une sûreté réelle qui permet à un créancier de se garantir sur l’ensemble du fonds de commerce de son débiteur. En cas de non-paiement, le créancier pourra demander la saisie et la vente du fonds, même s’il a été cédé à un tiers, afin de récupérer les sommes dues.
2. Quelle est la différence entre nantissement judiciaire et nantissement conventionnel ?
Le nantissement conventionnel résulte d’un accord volontaire entre le débiteur et le créancier, souvent formalisé dans un acte de cession ou un contrat de prêt accompagné d’un extrait Kbis conforme.
Le nantissement judiciaire, quant à lui, est ordonné par ordonnance d’un juge à la demande d’un créancier qui justifie de sa créance et du risque de non-paiement. Le nantissement judiciaire est demandé lorsque le débiteur ne donne pas son autorisation pour nantir le fonds.
3. Quels documents sont nécessaires pour inscrire un nantissement de fonds de commerce ?
Pour l’inscription au registre du commerce et des sociétés, il faut fournir :
- Un extrait Kbis récent du débiteur ;
- La copie conforme de l’acte de cession ou du contrat constitutif du nantissement ;
- Les pièces justifiant l’existence de la créance du créancier ;
- Le formulaire type (ou bordereau) dûment complété ;
- Un extrait Kbis.
4. Quelles sont les principales précautions avant de signer une cession avec nantissement ?
Il est conseillé de :
- Vérifier l’existence d’éventuels autres créanciers inscrits sur le fonds ;
- S’assurer de la régularité des formalités et de la validité de l’acte de cession ;
- Obtenir du cédant un extrait conforme et actualisé du registre des sûretés mobilières ;
- Faire appel à un avocat cession de fonds de commerce pour sécuriser l’opération.
5. Que se passe-t-il si le débiteur ne respecte pas ses obligations ?
En cas de non-paiement, le créancier nanti peut engager une procédure de saisie-vente du fonds de commerce après signification d’une ordonnance ou d’un titre exécutoire. Le produit de la vente est alors affecté prioritairement au paiement de sa créance, avant les autres créanciers.
6. La cession du droit au bail en présence d’un nantissement de fonds de commerce
Lorsque le fonds de commerce est grevé d’un nantissement, le droit au bail – qui en constitue un élément essentiel – est lui-même compris dans la garantie consentie au créancier. Cela signifie que le débiteur ne peut céder ce droit isolément ou dans le cadre de la cession de fonds de commerce sans tenir compte des droits du créancier nanti. En pratique, avant toute cession du bail, il est impératif d’obtenir l’accord préalable du créancier ou de procéder à la radiation du nantissement par ordonnance du juge, après paiement de la dette garantie. À défaut, le créancier est fondé à s’opposer à la signification de l’acte de cession auprès du bailleur ou à exercer son droit de suite sur le bail. L’avocat cession de fonds de commerce, en lien avec le greffe pour obtenir un extrait Kbis conforme, joue un rôle central pour vérifier les inscriptions, conseiller sur les conditions de levée du nantissement et sécuriser l’opération.
Le nantissement du fonds peut vous priver du local dont vous venir d’acquérir le droit au bail.
Nous ne pouvons que vous mettre en garde sur la complexité d’une cession de fonds de commerce et de droit au bail et vous conseiller de ne pas réaliser ce type d’opération sans l’aide d’un avocat spécialisé.
7. Si je suis créancier, quand dois-je prendre un nantissement ?
Dès que possible. Le rang des créanciers nantis entre eux est déterminé par la date de leurs inscriptions. Les créanciers inscrits le même jour viennent en concurrence. La date figurant sur votre certificat ou bordereau est donc déterminante pour savoir quel serait votre ordre de préférence. Il convient de conserver l’original en cas de d’erreur dans la date d’inscription.
8. Comment obtenir un nantissement conventionnel ?
Si vous souhaitez, à titre conservatoire, nantir un fonds, vous devez avoir l’accord du débiteur. Généralement, il s’agit d’une contrepartie que le débiteur pourra consentir en échange d’un avantage (prêt, fourniture de machines, etc).
Il faut donc un accord, généralement matérialisé sous seing privé. Il faudra déterminer les éléments inclus dans cette sûreté (il doit s’agir d’un des éléments constituant le fonds de commerce, par exemple : clientèle, droit au bail, le mobilier commercial, le matériel etc).
Vous devrez envoyer votre dossier au greffier du tribunal de commerce territorialement compétent (celui du lieu de la société débitrice – siège de l’entreprise). Il conviendra d’y joindre les documents obligatoires dont vous trouverez la liste sur infogreffe (ou sur le site du tribunal de commerce de Paris). Il y a notamment le bordereau le contrat de nantissement et le règlement des frais par chèque. Un dossier incomplet sera rejeté, pensez bien à joindre l’autorisation du débiteur et indiquer la somme garantie. En cas d’acceptation vous recevrez un expédition du bordereau d’inscription initiale tamponné par le greffe dans un délai de quelques jours à une semaine.
9. Un nantissement est il une sûreté définitive ?
Non, il peut être obtenu la mainlevée du nantissement (généralement en cas de paiement de la dette).
Autrement, le nantissement est par nature provisoire et sera radié au bout de 10 ans. Il sera toujours possible de régulariser le dépôt d’une demande de renouvellement du nantissement.
10. Que faire en cas de refus ou d’impossibilité de paiement de la part du propriétaire du fonds nanti ?
Il faudra saisir la justice pour obtenir un titre exécutoire. Le nantissement est une mesure conservatoire qui pourra être mise à exécution.
La vente forcée du fonds de commerce sera ordonnée en justice (par le tribunal de commerce) et la vente sera réalisée par un commissaire de justice après un délai de 8 jours.
11. Et si la dette est intégralement payée ?
Le cas est fréquent. Les crédits ont une durée de 7 années pour l’acquisition d’un fonds de commerce et les nantissement, ont une durée initiale de 10 ans.
En outre, il est fréquent que le crédit soit remboursé par anticipation.
En pareille hypothèse, vous pouvez demander la radiation du nantissement.
Il faudra adresser un tribunal un bordereau de radiation.
Cette radiation peut se faire si :
- Toutes les parties sont d’accord pour que le nantissement soit radié
ou
- En vertu d’une décision de justice ordonnant la radiation du nantissement. Il faudra publier des annonces légales pour rendre ce nantissement opposable aux tiers.
Ces frais peuvent être inclus dans les frais et honoraires de cession d’un fonds de commerce.